LETTRES À G… – Margo Ohayon

15 septembre 1998

Que l’écriture est loin autant que si je regardais l’horizon de la côte, ligne de fuite qui se déplace avec son silence en emportant son secret comme si Dieu était mort avant d’avoir pu nous le dire.

Il y a cinq minutes c’était le néant, voilà que la page blanche se couvre de la bonne encre, noire, mouvement marin, les pleins et les déliés fluent et refluent, bercement biologique du début à la fin de la ligne au début de l’autre ligne.

19 septembre 1998

En l’écriture il y a de grandes étendues vides où rien ne pénètre, d’où rien ne sort. Elles sont, dans le puzzle, des carrés blancs sans explication, des vides pour toujours inexpliqués, des zones où tout a été arraché, des lieux que la vie n’atteint pas encore, dont la destination n’a pas été décidée, où l’on passe à côté de tout, sols rebelles à toute implantation.